TAM TAM ( OCTOBRE 1995 )
Bonjour.

Heure : Pas loin de minuit.

Lieu : Un hangar immense, vide. Des néons découpent les lieux.

Objets : Deux chaises plantées au milieu. D'immenses enceintes hi-fi ceinturent les lieux. Un lecteur Cd Audio est pose à égale distances des chaises.

Bruits : Silence total. Sauf ...

Personnes : Deux hommes s'approchent l'un vers l'autre lentement. Chacun d'eux à la main, un automatique. Ils s'épient. Ils s'assoient lentement. Se fixent. Ils rangent simultanément les armes dans des étuis de cuir.

- Alors ?

- Killers !

- Oui, mais au singulier, s'il te plaît !.

- Non, le groupe. Tiens tu va écouter et lire aussi si tu le désires.

Il sort de poche des feuillets. Se lève. Doucement il s'approche du lecteur, appuie sur la touche PLAY et d'un seul coup les murs du hangar vibre. Pose les feuilles à terre. Il se rassoit. Ferme les yeux et respire la musique. L'autre homme se lève doucement, prend la liasse se rassoit et lit.

Bruno DOLHEGUY au chant et à la guitare

Patrick SORIA à la batterie

Alain GARCES à la basse

Fabrice ARNOUTS à la guitare

DISCOGRAPHIE

- Fils de la haine ( Pressage vynil, mais réédition en Cd Audio au mois d'Octobre )

- Danger de vie ( Pressage vynil )

- Mise au poings ( Pressage vynil, Cd Audio, K7 )

- Résistances ( Pressage vynil, Cd Audio, K7 )

- Cites interdites ( Pressage Cd Audio et K7 )

- Contre courant ( Pressage Cd Audio )

En dehors des Cd Audio Danger de vie et Résistances produit par la société Sydney Productions, tous les autres albums ont été auto produit.
Aucun 45 tours de ce groupe n'est disponible sur le marche. Par contre une vidéo de KILLERS sera présentée à la presse à la fin de l'année.
Seul le dernier album Contre courant est actuellement disponible dans les bonnes pâtisseries musicales.

Mais que vaut musicalement cet album ?

Depuis le temps que je flemmarde soit sur la conférence Musique.032 ou ici, sur le journal Tam-Tam, vous avez remarque, si vous êtes un lecteur fidèle, que je ne m'emballes pas facilement.

Mais aujourd'hui, et bien je sais pas, je suis accroche par ce groupe. Allez savoir pourquoi ?

Et pourtant, le style musical du groupe KILLERS, n'est pas habituellement ma tasse de the. Il faut dire que c'est du hard-rock pur et dur, comme nous bassine habituellement quelques radios, dans des moments de folies. M'obligeant à scanner sur d'autres fréquences.

Alors, pourquoi eux ?

Car, je continue à détester les autres groupes français ou anglophones jouant du hard-rock. Je ne pourrais dire, mais une chose est certaine, j'en suis complètement GAGA. Et pour le reste de ma famille c'est très très grave comme folie. Pensez donc, même mes poissons rouges ne font une tête en chocolat, des que je mets sur la platine cette galette musicale. Je dirais même mieux, elle ne quitte guerre le lecteur Cd Audio.

Ce n'est pas par idéologie du style " Aimons la musique française ", loin de la même. Mais il me semble avoir enfin trouve un groupe qui aux travers des mélodies mais aussi du texte, dit enfin quelque chose de plausible. Pas du sirop grenadine ou du pipi de chat.

En ce qui concerne donc l'album Contre Courant il se compose de douze morceaux. Chacun d'eux montre un certain mal de vivre non pas du groupe mais plutôt de notre société. Sorti en Avril de cette année, il est complètement d'actualité au moment ou j'écris les lignes. Ce qui fait quand même six mois qu'il est disponible dans les bonnes librairies musicales.

Certaines mauvaises langues, et je les vois pointer, me diront à juste titre que le mal de vivre existe quand même depuis quelques années. C'est vrai, mais les textes sont d'une justesse pile poil.

Je vous ferais pas le coup d'analyser chaque morceau de cet album mais plutôt de laisser parler un peu le groupe. Sachez quand même que l'interview qui va suivre est un peu particulier. En effet, afin que vous ayez le maximum d'informations à votre disposition sur le groupe KILLERS, j'ai faxé des questions au chanteur du groupe. En spécifiant que les réponses émanent de l'ensemble du groupe. C'est pour cela que certaines portes ouvertes par mes interlocuteurs dans leurs réponses n'ont pas été exploitées par une interrogation venant de ma part.

Ceci dit, laissons la parole au groupe KILLERS, du moins à son représentant, par le biais de cet interview fax.

L'INTERVIEW FAX

T-T: Comment est ne le groupe KILLERS, quelle a été votre démarche pour un jour vous dire
"Et si nous nous mettions en groupe" ?

B: On a tout d'abord commence dans la musique en "exécutant" des reprises de groupes de rock et de hard-rock.
On s'est plus ou moins fait la main dans le domaine de la mise en place de morceaux en groupe avec des capacités individuelles d'instrumentiste extrêmement limitées pour ne pas dire inexistantes.

Avec le recul, je crois que c'est la meilleure chose à faire : Commencer en groupe et apprendre ensemble à devenir un peu moins mauvais-)))
La notion de groupe est extrêmement importante dans le cas de KILLERS, on a toujours essaye de faire de notre mieux compte tenu des moyens dont on disposait.
Ce qui était vraiment super, c'était la sensation de soutien de nos propres morceaux.
C'est à cette date que l'on a appelé notre groupe "KILLERS".
Peu à peu, on est arrive à ne jouer que nos compositions et on s'est jeté à l'eau en participant à un tremplin rock régional que l'on a d'ailleurs remporté.
Ce qui était vraiment super, c'était la sensation de soutien qu'on a reçu de la part d'un public important totalement implique dans notre aventure. Notre expérience a d'ailleurs suscite beaucoup de vocations et on en était vraiment heureux car il est clair que plus on serait de groupes, plus les conditions seraient réunies pour que l'on se rende compte qu'il était en train de se passer quelque chose.

T-T: Y at-il les mêmes musiciens depuis le début ?

B: Je suis le seul "rescapé" de cette période qui a réussi à surmonter le cap des dix ans de présence au sein d'un seul et même groupe.
Il est clair que KILLERS a vu passer pas mal de monde mais jamais pour une courte période.

T-T: Pourrais -tu présenter les trois autres membres de KILLERS ainsi que leur cursus musical?

B: Il y a Patrick à la batterie qui est dans KILLERS depuis presque 4 ans. Il a joue auparavant pendant six ans dans un groupe qui s'appelait "EX-VOTTO".
A la basse, il y a Alain qui est dans KILLERS depuis quasiment 3 ans. Il a joue pendant 2 ans dans un groupe qui s'appelait "ARKANGE" puis pendant cinq ans dans un autre groupe nomme "CRAZY HAMMER".
Le dernier arrive dans KILLERS est Fabrice qui nous a rejoint il y a un an en tant que guitariste soliste.
Il a tout d'abord commence dans la musique en tant que batteur en 1989 dans un groupe qui s'appelait "LMG" puis un an plus tard, il est passe à la guitare dans un groupe nomme "KAWE KANEM".

T-T: De travailler en groupe, cela impose t-il des contraintes ?

B: Bien au contraire, à chaque fois que cela a été le cas, il a fallu résoudre les problèmes d'ego qui en étaient la cause d'une façon radicale afin de garder la cohésion et la cohérence nécessaire à un groupe comme KILLERS qui ne conçoit son existence que dans un respect et une entente réciproque dénué de tout individualisme.
Cela s'entend dans la mise en commun de nos propres personnalités offertes sans retenue au groupe qui s'en enrichit. Le bon et le mauvais de chacun est indispensable au groupe.

T-T: Entre vies professionnelles et musicales arrivez-vous à faire un partage équitable?

B: C'est pas toujours évident mais l'équilibre se fait de lui-même selon les impératifs et les contraintes de chacun.
Le groupe ne doit pas être en opposition avec le fait de devoir bosser. au contraire cela nous permet d'être plus sereins et c'est sûrement un gage de durée car on a depuis bien longtemps laisse tomber tout espoir de vivre de notre musique pour s'octroyer une liberté et une authenticité que le professionnalisme musical ne peut garantir.
On peut ainsi exister en étant totalement libres de nos choix sans aucune compromission au business.
C'est un aspect qui restera toujours un gage de sincérité.

T-T: Comment se passent vos démarches pour vos tournées ou concerts ? Et qui les promotionne ?

B: Ce sont essentiellement des organisateurs qui nous contactent. De plus en plus, nous rentrons en organisation, cela nous permet de contrôler un peu mieux les différents postes et on diminue ainsi un peu plus facilement les risques de galères.
C'est en se responsabilisant que l'on apprend le respect du travail effectue.

T-T: Si vous êtes auto produits est-ce un choix ? N'y a t-il pas assez de labels dans votre région ?

B: Tout dépend ce qu'un label est sensé nous apporter.
Si cela se traduit par des promesses non tenues comme c'est malheureusement trop souvent le cas, on a déjà donne...
L'expérience de douze ans de groupe permet de gommer la naïveté béate de ceux qui ne font que changer de marque de vaseline entre chaque album.
Nous avons décidé d'agir concrètement en faisant l'acquisition de matériel d'enregistrement pour avoir constamment à disposition la possibilité de sortir ce que bon nous semble.
Nous sommes ainsi seuls juges de notre direction artistique et maîtres de bout en bout de nos décisions.
Il nous reste à résoudre la distribution de nos enregistrements mais nous souhaitons pour cela prendre le temps d'examiner les différents paramètres afin de ne pas se retrouver déçus trop rapidement.

T-T: Certains ont parle de créer un fond de soutien aux petits labels qui s'alimenterait en taxant les majors.
Pensez-vous que cela aurait un effet positif ? qui devrait diriger ce fond de soutien ? Des politiques ?
Des artistes ?

B: Incontestablement, il faudrait d'autorité taxer les majors, c'est un vrai problème de liberté d'expression artistique.
Tous leurs discours d'aides aux "nouveaux talents" ne sont que poudre aux yeux et calculs fourbes.
On parle beaucoup mais rien n'est fait.
Je pense qu'il est dans l'intérêt d'un organisme tel que la SACEM de s'intéresser à ce problème.
Apres tout, nous en sommes tous membres en tant qu'auteurs et compositeurs et nous sommes une énorme majorité à rencontrer ces difficultés.
L'égalité si chère à la devise républicaine est bien loin de se traduire en ce domaine.
KILLERS existe, il dure, il vend et il avance d'album en album et de concert en concert envers et contre tous et il est grand temps de s'en apercevoir...

T-T: Il m'a semble que les textes de votre album "Contre-courant" sont principalement axes sur le mal de vivre de notre société. Est-ce pour vous important de montrer au travers des chansons les fractures sociales qui existent dans notre pays ?

B: C'est indispensable.
La tendance actuelle est au repliement sur soi-même: chacun sa merde et sauve qui peut...
Ce n'est pas normal, avoir les yeux ouverts et ouvrir sa gueule, c'est le rôle de tout humain qui se respecte.
Il ne faut pas attendre qu'un malheur nous arrive pour réagir à celui des autres.
On ne doit pas non plus se contenter d'avoir un discours de condamnation systématique, il faut aussi agir concrètement sans demander aux autres de faire ce que l'on n'est soi-même pas capable de faire.
Le Militantisme est aujourd'hui une notion complètement galvaudée, c'est une grave erreur car les gens deviennent égoïstes et peureux. Cela devient extrêmement dangereux car les gens délèguent leur devenir à des institutions répressives qui les sécurisent faute de rechercher véritablement à améliorer la société.

T-T: D'autres tendances musicales telles que le Rap essaient de définir le malaise social et principalement celui des jeunes dans notre société. Pensez-vous que votre style de musique peut se rapprocher du rap à partir du moment ou il dénonce un certain mal de vivre ?

B: Les styles musicales sont incontestablement différents mais les préoccupations sont souvent proches.
Je respecte ceux qui sont en adéquation avec leurs condamnations et qui refusent de jouer le rôle de pantin que l'industrie discographique leur destine.
Cela vaut d'ailleurs pour tous les styles de musique, sans aucune exception.

T-T: En ce qui concerne les textes, qui les écrits ? Sont-ils collectifs ou simplement le "fruit" d'une seule personne ?

B: J'écris la totalité des textes mais il est évident que l'approbation est collective.

T-T: En dehors de la musique que vous jouez, quelles sont vos musiques préférées ? Ainsi que vos groupes ou chanteurs préférés ?

B: J'écoute pour ma part assez peu de choses mais dans ce que j'écoute, on retrouve beaucoup de styles complètement différents :Musique traditionnelle Basque, Rock et Hard-rock basque, Hard-rock (plutôt speed/mélodique), Trust, Thiefaine, Renaud.

T-T: Comment voyez-vous votre propre groupe dans 10 ans ? KILLERS n'est-il qu'une étape musicale ?

B: KILLERS a vécu à ce jour durant une période équivalente à un tiers de mon age actuel.
Dans dix ans cela représentera la moitié de mon age, je crois qu'il est difficile pour ma part de parler étape.
Je n'ai pour ma part aucun mal à re-signer pour dix ans car je commence tout juste à savourer les dix années
écoulées, alors continuer de la sorte avec ceux qui m'entourent sera une vraie partie de plaisir.

CONCLUSION

Voila vous savez tout ou presque du groupe KILLERS. Votre mission, est non pas de promotionner ce groupe pour qu'il tombe sous la coupe d'une compagnie mais plutôt de le protéger d'un étouffement artistique venant de la part d'une Major.

Si vous acceptez cette mission, le Groupement des Amoureux de la Musique, niera toute participation à cette mission, si vous veniez à tomber amoureux de Julio Essuie-Glace, ou de M. Jackson.

Ce document ne s'auto détruira pas, mais nous vous demandons de le manger feuillet par feuillet.

L'homme releva la tête. Il posa les feuillets à terre. Regarda son partenaire qui avait toujours les yeux fermes. Il pencha la tête en arrière. Ferma les yeux.

Et .... respira la musique.

Laurent DUBOURG.

Lien direct vers l'interview : www.fdn.fr/~musical/tamtam/tam707.htm