INTERVIEW LES ACTEURS DE L'OMBRE ( Septembre 2007 )

1. Bonjour, tout d’abord je me prosterne devant l’un des deux plus grands groupes de la scène métal française et c’est un immense honneur pour moi que pouvoir faire la chronique de votre dernier album et cette interview.
Donc, c’est votre 15° galette, est ce que vous avez l’intention, comme dans la chanson « Faire du Metal », d’en faire jusqu’à la mort ? Et surtout laquelle, celle du groupe ou celle des musiciens ?

En restant juste fidèle au texte, je parle bien sûr de la mienne.
Vu que j'ai plutôt tendance à tenir mes engagements, si je fini centenaire, t'as pas fini de rigoler ;o)

2. Voyons quelques questions rituelles, après on rigolera plus. Etes-vous déjà en train de bosser sur le prochain album ?

L'album n'est sorti que depuis quatre mois en distribution, nous devons d'abord voir comment les choses se passent pour savoir où nous nous situons au niveau des ventes. Ces indications ne sont pas vitales car il y aura de toute façon toujours un prochain album en projet mais il faut qu'on en tienne compte car nous n'avons pas de mécène qui nous permettrait d'ignorer ces divers paramètres. Sinon, il est clair que nous avons beaucoup de morceaux en réserve et il n'est pas un secret de dire que nous en enregistrons plus ou moins régulièrement car nous avons choisi depuis maintenant presque 15 ans d'enregistrer à domicile.

3. J’aime beaucoup chercher des inspirations dans d’autres groupes mais là je vais m’abstenir. Toutefois, si vous avez envie de citer des groupes qui vous ont marqué ou qui vous marquent encore, je vous vous écoute.

Les influences se sont un peu estompées pour laisser place à une identité plus marquée et plus personnelle. C'est ça qui doit être privilégié artistiquement. C'est un enrichissement incomparable et une fierté certaine. Il est certain que c'est plus périlleux comme attitude car il est plus " vendeur " de cloner les groupes en vogue mais c'est ainsi que je vois les choses. Je crois pouvoir dire que l'on a réussi à nous forger notre propre identité et j'aurai beaucoup de mal à la rapprocher d'une façon flagrante de tel ou tel groupe.

4. J’adore les définitions de style. Votre label vous accroche l’étiquette du Speed Metal. Il est clair que c’est bien ce que vous faite depuis toujours, mais, vu qu’aucun groupe n’a encore véritablement répondu à cette question, pouvez vous me donner la définition technique de ce style ?

Je ne suis pas d'accord avec le fait que l'étiquette « Speed Metal » nous corresponde. Je ne suis d'ailleurs pas certain que notre label nous la colle. On a bien sûr pas mal de morceaux rapides mais il n'y a pas que ça, il me semble. D'un autre côté, il est clair qu'avec la formation actuelle on a accéléré toutes les versions des anciens morceaux mais pas au point de les rendre toutes speed. On a plutôt l'usage d'être présentés comme « Heavy Speed ». Ça ne veut pas dire grand chose non plus mais c'est souvent le cas avec les définitions de style. Vu que l'on aborde pas mal de tempos différents, c'est peut-être un peu moins restrictif.

5. Au niveau parole, c’est toujours assez direct, ça n’a pas beaucoup changé depuis le début. Mais suivez vous volontairement un thème ou est ce que vous écrivez selon l’humeur ? Dans cet album, « A l’ombre des vautour », j’ai pas bien vu le thème central.

Lorsque je commence à écrire, je ne sais quasiment jamais vers où je vais aller.
Donc, c'est plutôt un état d'esprit général qui va se dégager. C'est pour cela que j'essaie de le faire sur au moins deux ou trois périodes distinctes. Si des tendances reviennent, c'est que le sentiment général évoqué m'était particulièrement empreint. Il se peut également qu'il y ait des persistances mais je pense qu'il faut plutôt le voir comme une marque de fabrique, ce que certains nommeraient « style », en évacuant bien sûr toute prétention qui n'a absolument pas lieu d'être. J'écris les textes très tardivement mais j'ai toujours une partie de mon esprit qui y pense lors de toutes les étapes précédentes d'enregistrement. Je sais donc quand même plus ou moins les directions que je pourrais éventuellement essayer de prendre lorsque le moment sera venu mais cela ne se retrouvera pas sous la forme d'un seul et unique thème central.

6. Qui compose ? Qui écrit ? Parce que, avec le turn over du groupe, on s’y perd un peu.

Le line up est pourtant stable depuis plus de neuf ans, je pense que cela est assez significatif pour éloigner toute notion de « turn over ».
La base est toujours guitaristique.
Si cela vient de Thierry (...Thierry ANDRIEU/Guitare...), j'aménage plus ou moins les structures en fonction des parties chants que je pense placer.S'il s'avère que des rajouts minimes doivent être effectués, on voit ça ensemble.
Si cela vient de moi, je le fais directement au moment de la composition.
Pour les chants, j'ai toujours une idée immédiatement très précise mais je n'écris les paroles que très tardivement, le plus souvent d'un seul trait.

7. En matière de concert j’ai vu que vous aviez des grosses scènes en perspective et en plus vous allez faire deux dates avec ADX (l’autre plus grands groupes de la scène métal française). Ça fait quoi de jouer avec des anciens comme ça ?

Ça fait forcément plaisir même s'il y aura comme toujours la frustration d'un moment trop vite passé. J'espère que le public présent saura apprécier l'instant et que tous sauront se motiver pour ne pas rater ces moments précieux (27 octobre 2007 à BIDACHE et 13 janvier 2008 à PARIS)

8. Je voudrais revenir sur deux morceaux : Absent et Nouveau Monde. D’abords, je suis totalement fan de ce genre là. Absent parce que c’est du lourd, du puissant, du profond et j’adore ces riffs pesants (et même si j’avais pas de si gros doigts, j’aimerais bien apprendre à les faire). Nouveau Monde parce que j’adore les reprise de classique en Métal, c’est toujours du bon, du très bon. Bref, la question arrive : pourquoi faire ce genre de morceau quand on fait du Speed ? Et surtout, mais là je regarde les gratteux, vous faites comment pour jouer comme ça ?

Ce ne sont pas des morceaux qui sont particulièrement compliqués d'un point de vue technique. J'aime beaucoup par exemple tout le travail rythmique sur le début de « Absent ». Les deux parties guitares sont relativement simples à jouer et elles se complètent vraiment très bien. Même avec des gros doigts, je suis persuadé que tu y arriverais aisément ;o)
C'est un réel plaisir de varier les tempos. Avec KILLERS, nous avons toujours abordé les choses de cette façon. Cela s'est plus ou moins manifesté selon les albums mais je crois que c'est particulièrement le cas sur « A l'ombre des vautours ». Il va sans dire que je m'en réjouis.

9. J’aimerais revenir aussi sur le track 13 : Habemus Metal. Moins qu’une question, je voudrais vous ouvrir la tribune pour que vous puissiez, au-delà des paroles très claires du morceau, exprimer plus en détail les propos tenus.

Comme tu le dis : les paroles sont très claires. Elles peuvent éventuellement donner lieu à débattre et j'en suis tout à fait apte mais il faudrait pour cela que tu relèves les hameçons (si tu souhaites rajouter et intercaler des questions supplémentaires, n'hésite-pas)

10. Vu que vous avez 23 ans de vie, quel est votre regard sur la scène métal française actuelle ?

La scène metal actuelle française est très talentueuse. Elle a beaucoup progressée techniquement et beaucoup de groupes ont aujourd'hui une stature officieuse internationale. Il est dommage que l'hexagone ne puisse leur offrir une assise confortable qui leur permettrait de continuer à progresser d'une manière plus conséquente. Je crois qu'il faudrait actuellement que les groupes essaient plus de développer leurs propres identités en s'éloignant un peu de leurs influences mutuelles originelles. Cela pourrait être une manière de faire un pas supplémentaire et de franchir un nouveau palier. Au début, il est toujours normal de marcher dans le sillage de ses influences. Il faut savoir s'en démarquer pour apporter sa pierre à l'édifice. Cela permettrait d'enrichir l'aura de notre scène hexagonale ainsi que son audience car ils seraient davantage considérés comme des entités. Le public y verrait globalement un peu mieux et cela épicerait notre metal. Il y a un combat perpétuel sur les structures, il faut qu'il puisse se mener avec une sphère artistique moins prévisible et convenue. Pour ce qui concerne les noms, je ne t'en citerai pas car la liste serait vraiment trop longue si je dois les citer tous.

11. En tant que groupe connu et reconnu, expérimenté, que pensez vous de la « prestation » de Korn au dernier HellFest ? Et ce n’est pas un hasard si je la pose à vous et pas à d’autre groupe que j’ai interviewé depuis.

Je pense que tu dois faire allusion au fait qu'ils se soient barrés sans avoir joués en ayant quand même pris soin de toucher leur cachet. Ça ne m'étonne pas plus que ça. C'est clair que c'est pas cool pour ceux qui se sont déplacés pour eux mais c'est leur pilule et je la leur laisse. En aparté de cette histoire, je te citerai Slayer qui a joué le même soir et qui a été salué par beaucoup pour avoir bien assuré. Et bien, il y a quelques années nous avons fait 300 kilomètres pour aller les voir en Pays Basque à Bergara et ils nous ont fait le même coup en annulant pour des raisons obscures. Résultat : pas de concert et depuis, je n'ai plus écouté un seul morceau d'eux. Ils ne s'en portent sûrement pas plus mal mais, de mon côté, c'est classé. Si tout le monde réagissait de la sorte, les choses seraient peut-être différentes mais comme c'est loin d'être le cas, il n'y a pas de raison que cela change.

12. En parlant du HellFest, espérez vous y aller un jour ?

A ce jour, personne ne nous a jamais contacté à ce sujet mais il est bien évident que nous en serions très honorés.

Bon, si on rigolait un peu maintenant ?

13. Dans une interview dans Hardos Mag de 1985 vous avez fait un sale coup au journaliste qui vous avait envoyé 10 questions et vous leur avez, enfin juste toi Bruno, puisque les autres n’étaient pas encore là, répondu avec 4 pages. Allez-vous me faire le même coup ?

C'est juste, qu'à l'époque, je devais écrire un peu gros, rien de plus ;o) D'ailleurs, si tu regardes son interview, on est bien loin des 4 pages évoquées. Bon, sinon c'est sûr que je ne suis pas le plus avare de propos mais cela me semble être la moindre des choses quand quelqu'un te fait l'honneur de t'ouvrir sa tribune.

14. Les pantalons à large rayures verticales jaunes et noires, ils sont où ? Et les bracelets à clous qui prennent tout l’avant bras ? Et les Adidas montantes ? Et les cuirs serrés ?

Pantalons à rayures, je n'en ai jamais portés. Bracelets à clous, juste en 1984 et 1985, ça collait bien avec le trip du moment mais on a tout abandonné en 1986 avec le nouveau line up. Pour les groles, je continue toujours à mettre des montantes pour bien maintenir les chevilles et éviter ainsi qu'elles aient envie de trop enfler ;o) Pour les cuirs, ils n'ont jamais été serrés même si, parfois, la ceinture a tendance à déconner !!!

15. La dernière interview publiée sur votre site remonte à 2002. Vous avez joué les ermites pendant tout ce temps ou vous avez fait une crise de timidité aigue ? Bon, ok, ça c’est une question sérieuse, c’est le moyen déguisé de nous raconter pourquoi 4 ans d’absence.

C'est juste qu'il faut que je les mette en ligne. Ce n'est pas une priorité car elles sont disséminées de ci de là mais il est certain que ce sera mieux quand tout cela sera mis à jour. Le problème principal est le temps, pour l'heure, je n'ai pas encore pu le faire.

16. C’est normal qu’il n’y ait pas de lien vers ma chronique sur votre site ?

Le temps de le lire et c'est réparé ;o)

17. Sur le site on voit vos bobines en haut de page sur toutes les pages. C’est quoi : une autre idée du mont Rochemort, une décision collective d’avoir des tronches d’enterrement parce que le métalleux ne doit pas sourire quand le petit oiseau va sortir ou ce jour là, vous avez pris un contrôle fiscal ?

Ce sont juste les 4 photos individuelles qui figurent sur le livret de « A l'ombre des vautours ». On a les mêmes avec des sourires mais on a choisi de ne pas les mettre car il est bien évident que ça nous aurait décuplé les vente et on serait, à n'en pas douter, devenu redevable de l'impot sur les grandes fortunes. De ce fait, on aurait eu à subir des contrôles fiscaux et ça nous ne nous aurait pas fait sourire. Donc, quelque part, on a pris les devants, le privilège de l'expérience, en quelque sorte ;o)

Bon, voilà, tout est dit, je pense. Si vous voulez aborder un autre sujet, sérieux ou déconne, allez y.

Juste un remerciement pour ta passion et ton soutien.Merci à tous pour votre attention, j'espère vous avoir donné envie d'écouter ce nouvel album, si ce n'est pas encore fait.
Continuez à soutenir les groupes qui vous plaisent en achetant leurs albums, c'est vraiment important si vous souhaitez qu'ils puissent continuer à avancer.

Merci pour vos réponses.